Glyphosate : l’Anses fait le point sur les données de surveillance
L’Anses publie ce jour une synthèse des données de surveillance relatives à la substance glyphosate et dresse un état des connaissances disponibles en France concernant sa présence dans les eaux, les aliments ainsi que les niveaux d’imprégnation chez l’Homme.
Dans le cadre de son dispositif de phytopharmacovigilance pour détecter d’éventuels effets indésirables des produits phytosanitaires, l’Anses collecte un ensemble de données de surveillance relatives à la présence de résidus de substances dans les milieux, les expositions et les impacts sur la santé humaine et les écosystèmes. Ces informations sont résumées dans des fiches de synthèse « phytopharmacovigilance » par substance, afin d’être utiles à tous les acteurs notamment les services de contrôle et les administrations concernées.
L’Agence publie ce jour une fiche pour le glyphosate et l’acide aminométhylphosphonique ou AMPA son métabolite principal.
Glyphosate dans les milieux aquatiques et les eaux souterraines
Les analyses réalisées en 2017 montrent la présence fréquente du glyphosate et de l’AMPA dans les eaux de surface telles que les rivières et les lacs (50 % des prélèvements pour le glyphosate et 74 % pour l’AMPA), induisant une exposition des organismes aquatiques. Les concentrations observées sont généralement inférieures aux valeurs toxicologiques de référence en vigueur pour les environnements aquatiques avec un seul dépassement en onze ans de surveillance.
Dans les eaux souterraines, le glyphosate et l’AMPA sont présents dans 3 à 4 % des prélèvements en 2017 avec des dépassements annuels de la norme de qualité de l’eau (concentration maximale de 0,1 µg/L pour chaque substance) pour moins de 1% des points de prélèvements.
Glyphosate dans les eaux destinées à la consommation humaine
La présence de résidus de pesticides et de leurs métabolites dans l’eau potable est encadrée par la directive européenne 98/83/CE qui impose un suivi permanent de la qualité des eaux destinées à la consommation humaine (EDCH). Les concentrations maximales en résidus de pesticides dans les EDCH sont fixées à 0,1 µg/L pour chaque substance, cette valeur représentant une norme de qualité de l’eau et non de risque sanitaire. La surveillance des eaux destinées à la consommation humaine sur ces dix dernières années montre des dépassements du seuil de 0,1 µg/L pour un nombre très limité d’échantillons : 3 prélèvements sur 7596 pour le glyphosate en 2017.
Pour l’eau de boisson, la Vmax, valeur de référence dérivée des valeurs toxicologiques, est un seuil sanitaire. Elle est fixée pour le glyphosate et l’AMPA à une concentration maximale de 900 µg/L d’eau, soit 9 000 fois supérieur à la norme de qualité de l’eau de 0,1 µg/L.
Glyphosate dans l’alimentation et exposition par voie orale
Concernant l’exposition par voie alimentaire, les principales données sont issues d’études menées par l’Anses : l’Étude de l’Alimentation Totale Infantile de 2016, ainsi que de l’analyse des plans de surveillance et de contrôle pour les adultes et les enfants de 2014. Elles montrent la présence de faibles quantités de glyphosate dans les aliments, notamment les céréales, les raisins de cuve et les lentilles. Ces études mettent en évidence que l’exposition de la population française via l’alimentation est inférieure à 1 % de la dose journalière admissible (DJA), une valeur sanitaire de référence pour les risques de toxicité chronique. Afin d’améliorer l’estimation de l’exposition par voie orale, il serait pertinent de mieux documenter et analyser les autres modes d’exposition, par inhalation et par voie cutanée.
Enquêtes de surveillance des populations
La concentration de glyphosate dans les urines a été analysée dans deux études épidémiologiques menées en France, l’une portant sur une cohorte des femmes enceintes utilisatrices d’herbicides (étude PELAGIE de l’Inserm sur la période 2002-2006) et l’autre sur des femmes enceintes (étude ELFE de Santé publique France sur l’année 2011).
Le glyphosate et l’AMPA ont été retrouvés respectivement dans 43 % et 36 % des échantillons urinaires collectés chez les femmes de l’étude PELAGIE. Les concentrations urinaires observées varient entre 0,07 et 0,76 µg/L et pour l’AMPA entre 0,06 µg/L et 1,22 µg/L. Le glyphosate a été quantifié dans l’étude ELFE dans 0,3% des échantillons, mais d’autres données issues d’études publiées dans la littérature scientifique, ainsi que de prélèvements réalisés par des associations, rapportent des niveaux de concentration urinaire de glyphosate du même ordre de grandeur, autour de 1 µg/L. Ces quantités de glyphosate de l’ordre de 1 µg/L dans les urines, correspondent à une exposition par voir orale inférieure à 1% de la dose journalière admissible.
Des résultats complémentaires de surveillance du glyphosate dans les urines de la population générale seront disponibles en 2020 (étude ESTEBAN de Santé publique France) et viendront compléter ces résultats.
Par ailleurs, l’Anses poursuit ses travaux sur le glyphosate visant à renforcer les connaissances actuelles sur le potentiel caractère cancérogène de la substance, ainsi que l’évaluation des alternatives possibles au glyphosate dans le cadre des autorisations de mise sur le marché.
Valeurs de référence du Glyphosate
Pour les expositions par voie orale, la valeur toxicologique de référence est exprimée sous forme de dose journalière admissible (DJA). La DJA du glyphosate (dose journalière admissible pour une exposition chronique par voie orale), ainsi que la dose de référence aiguë, sont estimées à 0,5 mg/kg de poids corporel/jour. Les seuils de toxicité chronique et aigu pour un consommateur de 60 kg correspondent donc à une absorption quotidienne de 30 mg de glyphosate.
En ce qui concerne l’eau de boisson, la Vmax est une valeur de référence de gestion, dérivée de la valeur de référence toxicologique, permettant de garantir que le consommateur n’est pas exposé à des risques sanitaires. La Vmax pour le glyphosate et son métabolite l’AMPA ensemble est fixée à 900 microgrammes par litre dans les eaux destinées à la consommation humaine.
La phytopharmacovigilance
En 2015, l’Anses a mis en place un dispositif de phytopharmacovigilance afin de surveiller les potentiels effets indésirables des produits pesticides sur l’homme, les animaux et les écosystèmes. Il permet de rassembler les informations sur les contaminations des milieux et les expositions, ainsi que l’apparition de phénomènes de résistance aux produits phytosanitaires. Au travers de ce dispositif, l’Agence finance des études pour améliorer les connaissances sur l’impact des produits phytosanitaires sur l’Homme et l’environnement.
Pour en savoir plus sur la phytopharmacovigilance